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Source Naissance dans les toilettes des morts, la petite fille au placenta de plâtre accouche avec son baigneur sous le bras ; pas une âme, ni foulard ni main chaude, les quatre coins sont vides – seule la bouche-citerne s’agenouille, toutes dents dehors, pompes aspirantes bâillant au bout des tentacules, à même la nuit d’urine et de chlore qui ronge les socquettes de fil – accoudées à la cuvette, les brindilles blanches se couvrent de marbrures, luttent contre l’hiver, et tigelles des poignets, duvets, manches ballon s’égarent dans les frises, les robinets et les siphons, puis retombent avec le souffle, tremblant désastre de plumes, d’ailes, douleur disjointe par le milieu, contre la porte – mais le néon étripe l’esclandre, l’étale de la plinthe au plafond, alors appels et cris, dans la tête, sous les côtes, se figent sur le devant de la robe, au balcon de smocks, des doigts de géants ont déchiré les coutures, cassé leurs ongles dans les fronces, les crins des mouchoirs de deuil raclent la peau et cisaillent les roses, disséminent sur la neige graines de chiendent et de folle avoine : au jardin des rires jamais éclos, chaque jour que Dieu fait, l’hiver est précoce barrettes et frissons dans les rubans défaits, cheveux clairs roulés sur les ramilles, phalanges de craie, tout se tait – parfois un bredouillis dans sa bulle de bave remonte, l’entendent les murs quand ils prêtent l’oreille, mais le néon veille, gobe l’œuf, pulvérise le germe : dans les seins, quelque chose casse, d’un coup du placement aux outrages, le dedans est dehors, là, dans la flaque entre les pieds où les genoux observent des coquelicots flottants, démembrés au coupe-coupe, règles tendues par leur absence même, dans la nuit sidérée, dormie les yeux ouverts avec rage et sans réparation sous la poussée des palmes, de l’horizon du trou noir aux parois carrelées du monde, l’univers-île se dilate dans son pochon de sang, les boutons de bottine s’affolent, des ampoules s’allument autour du crâne mou, entre les pieds dans la flaque plus trace du cygne, plumage dégrafé, col rompu au lacet de cuir il a fondu sous le jet, chassé vers la bonde par les vents de latex aux doigts d’anges faits – t’inquiète petite, plus à faire, faits d’ailleurs, les nausées t’accouchent seules de caillots de plâtre – pieds pris dans les volants de ta chemise, tu étouffes le matin sous les coussins pressés, les pelletées de terre, et tu vois partout dans tes draps le polichinelle toutes bosses devant courant à son affaire – le néon du côté gauche, découpe des berceaux de fer pour naissances sous X à figures de gravats : pures présences accusatrices, index pointé sur ton carnet de notes fille brève à l’hermine défunte, au coquelicot interné dans la tête de bois, ta dot est d’ardoise, de dînette ébréchée pour vendredi maigre, de prières inversées dans les tiroirs, dans les moulins depuis la nuit des mères – reins de douleur que cette masse, pour les mères, courbées en deux, à chaux et à sable cette poisse, à chaque lune, pour chaque fille de mère, cette lie de ventre, de sang, de fond de poche à baigneur qui recommence fille non avenue, comme ton avenir ton passé est bréhaigne, se conjugue comme lui au présent perpétuel : ils sont cette veuve sans âge, visiteuse d’enfants placés sous le corset, dans le giron noir le baigneur se dévisse, arc-boute ses bras creux à la colonne de faïence – dans sa tête il fait sombre : un cornet à dés où les yeux tombent sur des glissoires molles – parfois, plein front, une idée l’attaque, d’infanticide ou de fessée, coudre la bouche, brûler le sexe, souder les paupières – pousser à l’envers, revenir à la terre le baigneur n’a pas d’âme où se regarder, il montre ses blessures à chaque claquement de porte : là, dans l’aine ouverte à la pointe du compas, les élastiques inutiles, ici, par les doigts grignotés l’air qui siffle, là, les cheveux peints qui s’écaillent, et ce rêve des chiffons de chair arrachés à deux mains du palais-dévidoir – toutes tâches sans mots, car le baigneur vorace est en avant de la langue, il ne l’entend pas, il n’entend que sa faim, sa bouche qui mâche le vide seule accroupie dans le plâtre, sur la flaque, la petite fille flotte, alors qu’accouche d’un placenta de coquelicot ce corps inconnu aux orifices déplacés, au visage improvisé, aux frontières délayées fuyant vers la bonde, elle flotte accroupie, petite pousse, elle fille, rassemble bras, pétales emportés, tiges dédoublées, lèvres fendues et pousse, mais que voit-elle dans leurs toilettes, entre les cuisses, quand les morts lui tendent le miroir : un éclair, un couinement, un rongeur, car nul ne s’arrête à sa hauteur, pas une âme au fond de l’eau, et dans son angle mort, le baigneur est interdit, la nuit déjà partie, demain fini – quant au jour, il est introuvable Michèle Dujardin Texte inédit pour Terres de femmes (D.R.) |
| MICHÈLE DUJARDIN ■ Michèle Dujardin sur Terres de femmes ▼ → Et bleu est je ■ Voir aussi ▼ → abadôn, le site de Michèle Dujardin → (sur le tiers livre) un extrait de abadôn |
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(Printemps des poètes 2010 « Couleur femme »)
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Ph., G.AdC PAYS SOUS LES CONTINENTS Sous chaque rive est une rive. Autorise-toi à effeuiller le palimpseste. Comme un début ou une fin du jour. Les yeux voués aux sillages infinitésimaux de la mer qui ouvre sur une autre mer. *
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Dominique Sorrente, « Pays sous les continents », Empire du milieu intérieur, Journal, 2003, in Pays sous les continents, un itinéraire poétique 1978-2008, Éditions MLD, 22000 Saint-Brieuc, 2009, pp. 139-140. |
| DOMINIQUE SORRENTE ![]() Source ■ Dominique Sorrente sur Terres de femmes ▼ → [À défaut de livre, au moins cette promesse de poème] (poème extrait d’Il y a de l’innocence dans l’air) → C’est bien ici la terre (note de lecture de Laurence Verrey) → C’est la terre → Écueils → J’écris comme on décide par fragments → [je suis celle qui se voue à la flamme] → Je t’envoie ma chanson des jours bleus → Le temps sans rideaux → [L’humeur est passe-partout] (extrait de Tu dis : rejoindre le fleuve) → [Les rideaux] (extrait des Gens comme ça va) → Le Scriptorium/Portrait de groupe en poésie ■ Voir aussi ▼ → (sur Publie.net) Dominique Sorrente | Pays sous les continents → (sur Poezibao) un autoportrait de Dominique Sorrente → (sur le site du cipM) une notice bio-bibliographique (non mise à jour) → (sur le site du Scriptorium de Marseille) un Portrait de Dominique Sorrente (site provisoirement indisponible) |
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Source IRO MO KA MO (extraits) “Ce qu’était Pasolini a disparu du monde social et culturel, et manque” a écrit Robert Maggiori “comme les lucioles disparaissent du monde naturel et manquent”. À Kyoto, le long d’une rivière dans le quartier de Gion, il est écrit sur un panneau: “N’attrapez pas les lucioles, s’il vous plaît”. Elle aimait attraper les lucioles quand elle était enfant. Sentir leur odeur un peu pharmaceutique dans le creux de ses mains. Ensuite elle les glissait dans une tige d’oignon et les faisait tournoyer. Une tige verte pour donner une lueur plus verte encore. “Longtemps après que la fleur d’iris s’est fanée, on peut sentir son parfum délicat au creux de la tige si on la casse” expliquait Sei Shonagon. […]
Ito Naga, Iro mo ka mo, la couleur et le parfum, Cheyne Éditeur, Collection Grands fonds, 2010, pp. 29, 73-74. |
| Sous le pseudonyme d’Ito Naga se cache un éminent astrophysicien français, né en 1957. Il collabore régulièrement à la revue italienne Sud et a déjà publié un premier ouvrage Je sais chez Cheyne Éditeur en 2006, qui en est aujourd’hui à sa cinquième réédition. « Pas besoin d’être grand clerc pour constater que, du monde, de soi et des autres, on ne sait pas grand chose. Il n’empêche. Il en est, biologiste, astrophysicien ou écrivain, qui ne désespèrent pas d’en savoir plus. C’est le cas de l’auteur de ce livre. Sa méthode ? Celle du scientifique qui s’apparente à celle du poète ou celle du philosophe : un affût intense qui met en examen tout ce qui tombe sous le regard, l’ordinaire, l’infime, l’incident de préférence. Où se vérifie cette loi heureuse : sous chaque observation, mille énigmes nouvelles. » (Jean-Pierre Siméon) ■ Ito Naga sur Terres de femmes ▼ → un autre extrait de Iro mo ka mo, la couleur et le parfum |
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Image, G.AdC SOMMAIRE DU MOIS DE JUIN 2010 ▪ Terres de femmes ― N° du mois de mai 2010 ▪ Ito Naga | Iro mo ka mo ▪ Dominique Sorrente | Pays sous les continents ▪ Adrienne Arth, Claude Ber, Joëlle Gardes, Méditations de lieux (note de lecture d’Angèle Paoli) ▪ Michèle Dujardin | Naissance Anthologie poétique Terres de femmes (71) ▪ Andrea Zanzotto | (Anticicloni, Inverni) ▪ 6 juin 1599 | Naissance de Diego Vélasquez ▪ Nicolas Bouvier | Depuis que le silence ▪ Icebergs – Le billet de Nestor (32) ▪ après Privas… Nicolas Pesquès (I). « du geste une écriture », par Yves di Manno ▪ après Privas… Nicolas Pesquès (II). J9, Prémisses de lecture d’une « énigme intime », par Angèle Paoli ▪ Marie-Claire Bancquart | En Angleterre Anthologie poétique Terres de femmes (72) ▪ Gabrielle Althen | Une fois le gris devenu l’autre versant du bleu Anthologie poétique Terres de femmes (73) ▪ Anne Creuchet | Vous pouvez bien passer les fleuves ▪ Gérard Cartier | Tristran par Nathalie Riera (Chroniques de femmes) ▪ Magda Cârneci | Culte postmoderne Anthologie poétique Terres de femmes (74) ▪ Aïcha Arnaout | Être et désêtre ▪ Pascal Boulanger | Art jésuite ▪ Camille Loivier, Il est nuit (lecture de Georges Guillain) ▪ Philippe Beck | Suie ▪ Béatrice Douvre | Nuit brisée ▪ Manège – Le billet de Nestor (33) ▪ Virginia Woolf | Sombrer dans le bleu (note de lecture d’Angèle Paoli) ▪ Valerio Magrelli | Aequator lentis ▪ Terres de femmes ― N° du mois de juillet 2010 |
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Image, G.AdC SOMMAIRE DU MOIS DE MAI 2010 ▪ Terres de femmes ― N° du mois d’avril 2010 ▪ 1er mai 1929/L’Amant de Lady Chatterley dans La NRF ▪ Roselyne Sibille/La tendresse me racine ▪ Les lois de l’hospitalité – Le billet de Nestor (27) ▪ Le Scriptorium/Portrait de groupe en poésie (note de lecture d’Angèle Paoli) ▪ Fabio Pusterla/Caparìca ▪ 6 mai 1856/Naissance de Freud ▪ André du Bouchet/sur la terre immobile ▪ Samatan (Angèle Paoli) ▪ Liliane Giraudon, La Poétesse par Jos Roy (Chroniques de femmes) ▪ Ronces noires – Le billet de Nestor (28) ▪ Jacques Ancet/Je reviens ▪ Ariane Dreyfus/Un recoin dans un coin ▪ Sebastianu Dalzeto, Pépé l’Anguille (note de lecture d’Angèle Paoli) ▪ Margherita Guidacci/In corsa ▪ 15 mai 1886/Mort d’Emily Dickinson ▪ Sebastianu Dalzeto/Cattivu sughjettu ’ssu zitellu ▪ Le Grand Prix Schiller 2010 remis à Philippe Jaccottet par Laurence Verrey (Chroniques de femmes) ▪ La cuisine des nécessités – Le billet de Nestor (29) ▪ 18 mai 1944/Naissance de W. G. Sebald ▪ Edoardo Sanguineti/Wirrwarr ▪ Juan Gelman/Arte poética ▪ 20 mai 1958/Journal de H.D. ▪ Pépé l’Anguille de Sebastianu Dalzeto (café littéraire à Aix-en-Provence) par Sylvie Saliceti (Chroniques de femmes) ▪ 22 mai 1966/Journal d’Alejandra Pizarnik ▪ Julio Cortázar/Milonga ▪ Samba de Chegada – Le billet de Nestor (30) ▪ Anne-Lise Blanchard/Elle est à marée Anthologie poétique Terres de femmes (70) ▪ Flaviano Pisanelli/Entre deux lunes ▪ Ana Marques Gastão/Bailarinas ▪ Mai 1977/Philippe Jaccottet, La Semaison ▪ Frank O’Hara/Cornkind ▪ Stéphane Crémer/Lignes d’eau ▪ Nubile ’66 – Le billet de Nestor (31) ▪ Terres de femmes ― N° du mois de juin 2010 |
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