Terres de Femmes

Étiquette : Olga Sedakova


  • Olga Sedakova | Sant Alessio, Roma

    Topique : Rome
    «  Poésie d’un jour  »

    Portait_de_olga_sedakova
    Image, G.AdC





    SANT ALESSIO, ROME


    Hirondelles romaines,
    hirondelles de l’Aventin
    lorsque vous volez,
    les yeux fortement plissés,

            (depuis bien longtemps je sais
            que tout ce qui vole est aveugle
            et c’est pourquoi les oiseaux disent : « Seigneur ! »
            comme l’homme ne peut le faire)

    lorsque vous volez
    allant on ne sait où, venant l’on ne sait d’où
    devant les rameaux d’orangers et les pins…

    le fugitif revient dans la maison paternelle
    ancienne et profonde comme l’eau dans le puits.

    Non, tout ne sera pas perdu
    tout ne disparaîtra pas.
             Cette gratuité
    Cette inutilité pour quiconque
             cela
    que ne reconnaissent pas même une mère ou une épouse
    cela ne disparaît pas.

    Et comme tout est bon à la fin.
    Comme il est bon que tout
    ce que l’on désire tant, que l’on demande avec tant d’insistance
    pour quoi l’on donnerait
    ce qu’il y a de plus cher
    que tout cela ne s’avère nullement nécessaire.

    Ils n’ont pas su reconnaître – mais qui le pourrait ?
    Pour ce qu’il en reste !
    Des plaies et des os.

    Des os secs, comme dans la vallée de Josaphat.

                                                  (traduction de Marie-Noëlle Pane)





    Aventino
    Ph., G.AdC





    SANT ALESSIO. ROMA


    Римские ласточки
    ласточки Авентина
    когда вы летите
    крепко зажмурившись

            (о как давно я знаю,
            что все, что летит, ослепло
            и поэтому птицы говорят: « Господи! »
            как человек не может)

    когда вы летите
    неизвестно куда неизвестно откуда
    мимо апельсиновых веток и пиний…

    беглец возвращается в родительский дом
    в старый и глубокий, как вода в колодце.

    Нет, не все пропадет
    не все исчезнет.
            Эта никчемность
    эта никому-не-нужность
            это
    чего не узнают родная мать и невеста
    это не исчезает.

    Как хорошо наконец.
    Как хорошо, что все
    чего так хотят, так просят
    за что отдают
    самое дорогое –

    что все это, оказывается, совсем не нужно.

    Не узнали – да и кто узнает?
    Что осталось-то?
    язвы да кости

    Кости сухие, как в долине Иосафата

    Москва: журнал “Итака”, изд-во “Логос”, 2001.


    Olga Sedakova, Poètes russes d’aujourd’hui, anthologie bilingue, La Différence, 2005, pp. 206-207.



    NOTE d’Angèle : Saint Alexis (prénom de mon fils) est fêté le 17 mars par l’Église orthodoxe et le 17 février par l’Église catholique. Par ailleurs, le Dramma musicale Il Sant’Alessio de Stefano Landi a été exécuté pour la première fois le 8 mars 1631 à Rome [extrait sur YouTube, DVD réalisé le 19 mai 2008].







    NOTICE BIO-BIBLIOGRAPHIQUE


        Née le 26 décembre 1949 à Moscou où elle vit, Olga Aleksandrovna Sedakova [Ольга Александровна Седакова] enseigne la littérature à l’université de Moscou. Elle est aussi docteur honoris causa de l’université de théologie de Minsk.

        Ses poèmes ont d’abord été diffusés en samizdat. Parmi ses recueils : Portes, fenêtres, arches (sa première publication de poésie aux éditions YMCA-Press, Paris, 1986), Le Voyage des rois mages (2001), Le Voyage en Chine (2001). Olga Sedakova est lauréate du Prix européen de poésie (Rome 1996), du prix de la société Soloviev (1998) et du prix Soljenitsyne (2003).

        Ont été traduits en français, en 2001, son essai, Éloge de la poésie (traduction de Ghislaine Capogna Bardet, L’Âge d’homme), puis, en 2005, Voyage à Tartu, suivi de Poésie & Anthropologie et de Quelques remarques sur l’art de la traduction (traduction de Philippe Arjakovsky, Sauve, Clémence Hiver, 2005). Un recueil de ses poèmes est paru en 2004 (Le Voyage en Chine et autres poèmes, traduction de Léon Robel et Marie-Noëlle Pane, Caractères).





    Voir/écouter aussi :

    – (sur Lyrkline) le poème « Sant Alessio, Roma » lu par Olga Sedakova ;
    – (sur Terres de femmes)
    La soupente sur l’Aventin ;
    – (sur le site du cipM) une
    notice bio-bibliographique sur Olga Sedakova (+ un poème [« La Musique »] dit à voix haute) ;
    – (sur TV5-Web-TV) une courte vidéo [2 min 04s] sur
    Olga Sedakova ;
    – un site dédié à
    Olga Sedakova ;
    – (sur le site de l’Université de Sassari) une
    édition en ligne [russe-italien] du recueil Le Voyage en Chine ;
    – (sur Poet Page)
    quatre poèmes de Olga Sedakova dits par elle-même ;
    – (sur
    ImWerden) huit autres poèmes dits par Olga Sedakova (1)(2)(3)(4)(5)(6)(7)(8) [mp3 dézippés] ;
    – (sur Terres de femmes) une autre poète russe d’aujourd’hui :
    Vera Pavlova.


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