Terres de Femmes

Mois : février 2017


  • Nathalie Michel, Veille

    par Isabelle Lévesque

    Nathalie Michel, Veille,
    éditions LansKine, 2016.



    Lecture d’Isabelle Lévesque



    LETTRE J
    « J » comme « jour […] Premier jour d’une Genèse ? »
    Ph., G.AdC







    De ce jour ne reste que la nuit.
    N.M.




    « J » comme « jour », de « J1 » à « J199 », journées dénombrées de mai à novembre 2015. Ce sont jours de veille : depuis soi-même, la poète note et enregistre son paysage sonore et visuel. Le travail des jours se répète, lent labeur des sillons qu’il faut creuser à la bêche, comme on retourne la terre pour voir les vers nombreux. L’écriture qui sait respirer peut-elle recoudre le monde à coups de bêche ? Les moments minuscules s’accumulent. On regarde dehors, les « [g]randes pluies jetées sur les vitres » : ce sont les premiers mots de J1. On entend. C’est la pluie-vie, l’élan de l’eau (« jetée » par qui ?) ranimant et faisant vie dans Veille de Nathalie Michel. Premier jour d’une Genèse ? Au ciel se lisent les signes d’alliance, les nuages s’écartent. Arc-en-ciel : J2. Est-ce la vie qui revient ? Le poème qui veille guette les signes, infimes parcelles de réalité. La Symphonie n° 3 (1976) de Górecki, dite « Symphonie des chants plaintifs » ou « Chants de deuil » (op. 36), résonne, musique lente, douce et triste dont le chant évoque la guerre. Le dernier mouvement s’achève sur des accords longuement tenus… Quelque chose est fini, un autre temps commence lentement qui peine à sortir de la nuit et de la faille.

    Des notations, à propos de l’heure/la durée, la météorologie, les états de la nature, l’avancée de la saison, ancrent le texte. Avant la formulation développée, les mots non déterminés s’alignent sur la page comme des informations ou des stimulations : « Nuit, rien, souffle ». Le philosophe Henri Maldiney avait évoqué cette « faille, ce vide sans défaut qui s’ouvre avec l’appel. Chaque vide livre son ciel où tout ce qui prétend le contenir est en suspens. L’appel au vide ne veut rien. […] l’existence est une exclamation dans le vide éclaté. Dans l’ouvert, nous pouvons contempler son accès. C’est dans le Rien que nous pouvons contempler son secret. »1

    De cette première impression, l’écriture garde trace comme une onde sismique portée sur la perception.

    « Je ne sais pas ce qui est réel », précise un commentaire bref. Un « je » hésite, regarde comme une photographie le monde pixellisé à une heure précise (« 7H35 »). Un détail, un être dont l’existence est perçue devient la mesure du quotidien :

    « Autrefois une araignée m’a tenu compagnie tout un hiver. Il n’y avait qu’elle et moi dans la maison glaciale. Elle n’a pas bougé durant des mois. » Elle aussi veillait, guetteuse dans sa toile. Quelle était sa perception du temps ? Était-elle identique à celle de la narratrice qui l’observe ?

    Nombre de points infimes, devenus le centre, construisent un mode de perception fondé sur ces détails qui deviennent les constituants uniques du temps.

    Les phrases longues alternent avec de courtes propositions proposant tantôt un rythme déployé, tantôt une cadence resserrée. La note devient parfois poème en vers peu ou non ponctués.

    « La boîte à bourdon.

    Donne à entendre le bruit que fait le son

    l’énergie de la matière

    ce qui passe à travers tout

    le bruit profond

    le fluide

    des transformations

    laissez les flux, laissez passer, laissez… feuillages et migrations laissez… ».

    Les bourdons résonnent en parallèle dans Veille. Bruits du monde jour après jour en ces mois de 2015 à travers la radio et la télévision : réfugiés qui se noient en Méditerranée, réfugiés que nous retenons aux frontières et refusons d’accueillir, crise et misère en Grèce… Fermetures. Frontières réaffirmées.

    Mais on entend aussi des bourdons personnels, comme ceux des soucis de santé ou d’amour. Dans son Journal, Kafka se demandait : « Comment puis-je espérer souder des morceaux pour en faire une histoire vibrante ? » La question se pose toujours devant l’écriture de fragments séparés par des blancs. Les notes tenues tout au long de l’ouvrage en s’entremêlant tissent cette histoire vibrante.

    La narratrice écoute beaucoup de musique. Il s’agit le plus souvent de musique électronique ou électro-acoustique de musiciens qui utilisent justement ces « drones » (ou bourdons) fréquents dans la musique spectrale. Éliane Radigue, Joachim Montessuis, Pan Sonic ou Ryioji Ikada entraînent l’auditrice vers le cosmos. Les voix du Requiem de György Ligeti traversent le corps. Les enceintes vibrent et font vibrer. Les voix passent du murmure au cri. On passe de l’invitation à la méditation puis au dépassement. Peut-on échapper au vacarme du monde qui ne cesse ?

    « Saisir les flux, laisser faire, accorder son corps, son instrument, ses perceptions pour en tirer toutes les nuances, tous les possibles. »

    Parfois la musique porte à la danse, à la transe, comme celle, toute spirituelle, des derviches.

    « Tel un derviche, je tourne, je tourne, je tourne, je tourne […] » (dernière proposition répétée trente-trois fois).

    Les ondes musicales « transport[ent] de l’énergie, ne transport[ent] aucune matière ». Du cosmos et de l’envol, la narratrice revient à la terre et à son travail humble, à ce journal paysan de l’origine qui bêche et retourne comme on heurte le monde pour qu’il advienne. Lors de ce retour à la matière, sur la page, les mots griffonnés seront pleins de cette terre aveuglant les mots tachés, tâchant de dire ce qui est. Le réseau lexical fourmille de rebonds des mots qui résistent, comme sautillent des sons allègres, répétés, assonances du [o], pour les trois ânes au pré, « troizânimos », « chevalos », « se riant de nos dos, aussi bien que nos os » : la comptine, la langue à fourche qui creuse dans les mots des sons espiègles. Les ânes, dont l’un s’appelle Bartleby, sont l’image même du refus de l’horreur quotidienne.

    « Les yeux des ânes dans le champ portent un regard tranquille sur le monde. Je m’assois à leurs pieds. »

    L’immobilité, la patience, c’est aussi un retour à soi.

    « Dans la fraîcheur, avec les ânes, nous veillerons. »

    Veiller : ne pas céder au sommeil dans la nuit, résister et guetter ce qui peut advenir, lumière nouvelle, ouverture d’un chemin possible, peut-être. De quelle imminence la poète est-elle la sentinelle ?

    Dans le livre d’Isaïe de l’Ancien Testament, à la question répétée « Veilleur, où en est la nuit ? Veilleur où en est la nuit ? », le veilleur répond : « Le matin vient, puis encore la nuit. »

    Au milieu du jardin, dans la pensée des racines sèches comme des cordes, la poète médite, imagine ces cordes comme des lignes entrecroisées de vers. Il suffit d’un son, d’un glissement de pensée d’un animal à l’autre, du « chevalo » à la vache, pour que s’effectuent des bonds d’une idée à l’autre. La vache s’est enfuie, à coups de bâtons on la ramène et revient l’idée de l’araignée restée/partie. Monde peuplé, vivant, mais où chacun est enfermé. « Nous défaisons, ruinons les ruines. »

    Parfois les mots sont refusés. Des jours manquent : J5, J10, J11, et beaucoup d’autres ensuite. Certains sont presque sans mots : « De ce jour ne reste que la nuit » (J7). Ou encore : « Les frontières petit à petit se ferment. // Pluie, soleil, vent » (J14).

    Parfois une ligne de mots est remplacée par une série de 5 à 10 barres obliques : « ////////// »

    Le silence occupe l’espace, « [r]ien. Les mots rien. Dire n’est pas. » Alors décousu, le texte suit la saison (les sapins grandissent), l’araignée a disparu.

    Au cœur : construire/détruire. Le minime, apparemment minime, joue sa partition. Le tour de la mouche, « qui se cogne d’une vitre à l’autre », amorce le bruit, entonne la ronde, « le son nous sort » ou les « sons bègues ». La musique peut se faire ritournelle, mode désaccentué de mots répétés (l’âne, « il marche, il marche, il marche » lorsqu’il retrouve la liberté), paraboles constantes des animaux ou des végétaux pris dans un piège ou s’échappant comme nous le faisons, proposant une issue au sens comme le font les rhizomes, « organ[es] de réserve de la plante », image de cette écriture où les fragments sont reliés entre eux.

    La communauté du jardin, du champ, de la maison n’exclut pas la solitude. La préfixation des mots que les traits d’union décousent fourmille dans le texte comme une invitation (peut-être impossible) à recoudre le réel à soi, l’identité au réel. On sent qu’on risque gros, « le son nous joue ». La rédaction d’un vrai journal est refusée, « [n]on pas récit des jours mais autre chose », « [b]équille au poème qui ne se fait plus ? ». Dans son livre précédent, Nathalie Michel proposait des poèmes souvent proches de Veille. Souffle continue2, affirmait le titre. Sans le « e » final, on pourrait penser à ces techniques des musiciens souffleurs qui leur permet de jouer sans silence pour reprendre leur respiration. S’agissait-il de deux impératifs incitant doublement à vivre ou d’une phrase dont le sujet sans déterminant semblait indiquer un essoufflement ? La première partie, « Demeure », proposait des poèmes souvent comme éclatés sur la page, matière qui se défait, se délie pour un être qui s’en va sans disparaître, qui a transmis son souffle. Mais quand le poème se refuse, les notes enregistrent les mouvements telluriques intérieurs. En parataxe, sur le fil, elles répondent au désordre du vécu : le décousu, le provisoire et le lien. Souvent, on se heurte à l’inachevé, « [t]ant d’opposition entre nous… ». Les points de suspension nous laissent libres de poursuivre mais le point simple vient aussi clore des propositions qu’aucune conjonction ne relie. Logique dé-faite d’une perception laissée à l’instant.

    Veille, placée face au monde et dans le monde, une conscience reste vigilante pour lire, regarder, entendre. Lire dans le ciel ce que la nature révèle ou passage par l’écran hypnotique de l’ordinateur et du tchat alors que le travail des champs appelle autour. Criant besoin de lumière, alors que les lucioles ont disparu, « écrasées ». Remontent les racines latines, flux et lux comme évidente nécessité, ou unité de mesure « de l’éclairement lumineux ». Qui manque. Et parfois l’incursion du vers coupe le flux, à contrecourant, des unités courtes énumèrent ce à quoi se tenir avant de sombrer :

    « À la mer

    la plage était minuscule, l’eau verte et chaude

    vieux rivages normands

    des boules, des bouées, des ballons

    le corps des plages

    le son des voix

    la mer montait

    elle avalait tout sur son passage. »

    Traces et souvenirs en bribes.

    Des déplacements, des retours, le mot « fin » souvent (page 63), près de la nuit quand « les astres tombent », l’écran c’est le corps, perdu, les mots coupés par tirets qui désunissent (« Mi-nuit-le-champ ») et le « tu », interpellé.

    « Tu as rêvé d’une rencontre, d’un amour gigantesque, le dernier, pour sauver un peu de ça, le monde cassé. »

    On voudrait un « nous » alors que seule avec ses bêtes la narratrice monte « vers les cimes », se remémore le temps du 2. L’indéfini gagne les déterminants « des corps, des heures, des jours » comme le gris qu’on met partout pour cacher ce qui éloigne d’un « nous » constitué, couple ou humanité fraternelle et solidaire puisque restera :

    « Tout – poudre. »

    La dernière musique présente est le succès de Bourvil, C’était bien (1961)3. L’accordéon y joue une petite valse, mélancolique ritournelle du souvenir d’un amour perdu. Le couple dansait « sur une piste de misère », « parmi les gravats ». C’était juste « après la guerre » « dans ce p’tit bal qui s’appelait… qui s’appelait… qui s’appelait… ». Mais le nom s’est perdu.

    Que faire ?

    « Recours aux vielles, aux violes, aux violoncelles. Aux grands airs, au grand air, aux clairières, aux friches, aux forêts, aux ruines, aux rouilles, aux lichens, à la fuite, à l’errance, à la vie, je vais sortir, je vais courir, je vais crier, je vais tourner, tourner, je m’envolerai, avec les buses, avec les biches, les araignées. »

    À la fin, le « i » se déplace, « veille » devient « vielle », entre les derniers mots et le titre, un pont s’établit. Tournent la manivelle et les danseurs… Oui, « c’était bien ».



    Isabelle Lévesque
    D.R. Isabelle Lévesque
    pour Terres de femmes




    ____________________________
    1. Henri Maldiney, In media vita (Les Éditions du Cerf, 2013), p. 48. Une partie de cette citation est présente à la fin de Veille.
    2. Nathalie Michel, Souffle continue, avec trois peintures de l’auteur (éditions LansKine, 2012).
    3. « C’était bien (Le petit bal perdu) ». Musique de Gaby Verlor (20 novembre 1921-6 avril 2005), paroles de Robert Nyel (18 avril 1930-26 novembre 2016).






    Nathalie Michel, Veille






    NATHALIE   MICHEL


    Nathalie Michel




    ■ Nathalie Michel
    sur Terres de femmes

    [Alone Together] (extrait de Veille)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions LansKine)
    la fiche de l’éditeur sur Veille de Nathalie Michel




    ■ Autres notes de lecture (54) d’Isabelle Lévesque
    sur Terres de femmes


    Max Alhau, Les Mots en blanc
    Marie Alloy, Cette lumière qui peint le monde
    Gabrielle Althen, Soleil patient
    Françoise Ascal, Noir-racine précédé de Le Fil de l’oubli
    Edith Azam, Décembre m’a ciguë
    Gérard Bayo, Jours d’Excideuil
    Mathieu Bénézet, Premier crayon
    Véronique Bergen, Hélène Cixous, La langue plus-que-vive
    Claudine Bohi, Mère la seule
    Paul de Brancion, Qui s’oppose à l’Angkar est un cadavre
    Laure Cambau, Ma peau ne protège que vous
    Valérie Canat de Chizy, Je murmure au lilas (que j’aime)
    Fabrice Caravaca, La Falaise
    Jean-Pierre Chambon, Zélia
    Françoise Clédat, A ore, Oradour
    Colette Deblé, La même aussi
    Loïc Demey, Je, d’un accident ou d’amour
    Sabine Dewulf, Et je suis sur la terre
    Pierre Dhainaut, Après
    Pierre Dhainaut, Ici
    Pierre Dhainaut, Progrès d’une éclaircie suivi de Largesses de l’air
    Pierre Dhainaut, Vocation de l’esquisse
    Pierre Dhainaut, Voix entre voix
    Armand Dupuy, Mieux taire
    Armand Dupuy, Présent faible
    Estelle Fenzy, Rouge vive
    Bruno Fern, reverbs    phrases simples
    Élie-Charles Flamand, Braise de l’unité
    Aurélie Foglia, Gens de peine
    Philippe Fumery, La Vallée des Ammeln
    Laure Gauthier, kaspar de pierre
    Raphaële George, Double intérieur
    Jean-Louis Giovannoni, Issue de retour
    Cécile Guivarch, Sans Abuelo Petite
    Cécile A. Holdban, Poèmes d’après suivi de La Route de sel
    Sabine Huynh, Les Colibris à reculons
    Sabine Huynh, Kvar lo
    Lionel Jung-Allégret, Derrière la porte ouverte
    Mélanie Leblanc, Des falaises
    Gérard Macé, Homère au royaume des morts a les yeux ouverts
    Béatrice Marchal, Au pied de la cascade
    Béatrice Marchal, Un jour enfin l’accès suivi de Progression jusqu’au cœur
    Jean-François Mathé, Retenu par ce qui s’en va
    Dominique Maurizi, Fly
    Dominique Maurizi, La Lumière imaginée
    Emmanuel Merle, Dernières paroles de Perceval
    Isabelle Monnin, Les Gens dans l’enveloppe
    Jacques Moulin, L’Épine blanche
    Cécile Oumhani, La Nudité des pierres
    Emmanuelle Pagano, Nouons-nous
    Hervé Planquois, Ô futur
    Sofia Queiros, Normale saisonnière
    Jacques Roman, Proférations
    Pauline Von Aesch, Nu compris






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  • TdF n° 147 ― février 2017  (Sommaire)



    Tdf fev 2017
    Image, G.AdC






    SOMMAIRE DU MOIS DE FÉVRIER 2017


    Terres de femmes ― N° du mois de janvier 2017
    Claudia Azzola | Saltimbanques de rue
    Dominique Maurizi | [Mais qu’ai-je dit ?]
    Brigitte Baumié, Paysages intermittents (extraits)
    Nathalie Michel, Veille (lecture d’Isabelle Lévesque)
    Serge Velay, Le Palais d’été (extrait)
    Thomas Vinau | Les gouttes
    Claude Ber, Il y a des choses que non (lecture d’Angèle Paoli)
    Bartolo Cattafi, Mars et ses ides (extraits)
    Ariel Spiegler | [Je vais ramasser dans mes paumes]
    Nicolas Grégoire | [tendre tendue]
    Arian Leka | [L’amour en automne]
    Nathalie Michel | [Alone Together]
    Sophie Loizeau | [Moabi quand tout va bien]
    Sofia Queiros | [je à la pointe du jour]
    Frédéric Tison, Le Dieu des portes (lecture d’Angèle Paoli)
    Henri Meschonnic | [chaque instant est un nouveau visage]
    Lou Raoul | [dans les maisons détruites abandonnées]
    Béatrice Bonhomme | Tes nuits sont devenues mes jours
    Maud Thiria, Brindilles (extraits)
    Ève de Laudec & Bruno Toffano | [Pleine | Gorgée d’esquives]
    France Burghelle Rey | Les Tesselles du jour (extraits)
    Brina Svit, Nouvelles définitions de l’amour (lecture d’Angèle Paoli)
    Paul Farellier | [Ce sera très loin sous la mer]
    Mélanie Leblanc, Des falaises (lecture d’Isabelle Lévesque)
    Terres de femmes ― N° du mois de mars 2017

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  • Terres de femmes n° 147 ― février 2017






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    du numéro du mois de février 2017







    Tdf fev 2017




    Responsable de la rédaction : Angèle Paoli
    Coordination éditoriale et mise en pages : Yves Thomas
    Direction artistique et mise en images : Guidu Antonietti di Cinarca [G. AdC]



    © 2004-2018 Angèle Paoli. Tous droits réservés.


  • Brigitte Baumié, Paysages intermittents (extraits)



    Paysages intermittents.jpg 2
    « Paysages intermittents »
    Triptyque photographique, G.AdC








    RÊVERIE



    Roses de jardins
    iris sauvages

    l’attente en fond sonore
    délicats bourgeons

    bourdon ininterrompu
    pivoines échevelées

    sur tout ce qui

    mélodiquement

    se disloque






    ENFANCE



    On va chercher les œufs et le beurre à
    la ferme. Près de la fenêtre la vieille est
    immobile, entourée d’un tapis de mouches.






    PRÉSENT



    Par la fenêtre, elle regarde les arbres défiler
    le nom des arbres
    ou plutôt
    faire le lien entre les visages des arbres et
    leurs noms…
    Bouleau, chêne, hêtre, mélèze, orme et frêne
    se mélangent les branches et les radicelles.






    ENFANCE



    Quelqu’un qu’on ne sait même pas qu’on
    attend…
    Est-ce que quelqu’un qu’on ne sait pas peut
    remonter l’allée ?

    Mes pieds pourraient s’enraciner, là, entre
    les platanes. Alors plus rien ne pourrait
    monter ou descendre l’allée.

    Est-ce que le temps s’arrêterait ?



    Brigitte Baumié, Paysages intermittents, Éditions La Boucherie littéraire, Collection La feuille et le fusil, 84160 Cadenet, 2016, pp. 32-33-34-35.






    Brigitte Baumié, Paysages intermittents.jpg 2






    BRIGITTE BAUMIÉ


    Baumiebrigitte_lydiemayaffre
    Ph. D.R. : Lydie Mayaffre



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site Languedoc Roussillon livre et lecture)
    une notice bio-bibliographique sur Brigitte Baumié
    le site des éditions La Boucherie littéraire





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  • Dominique Maurizi | [Mais qu’ai-je dit ?]



    [MAIS QU’AI-JE DIT ?]




    Mais qu’ai-je dit ? Dit
    que j’écris. Dire qu’au
    galop rutilant c’est la rétine
    qui a soif, qui clique,
    claque.
    Dire. Comme voûte du
    ciel j’ai l’odeur de ta peau.
    La terre pour l’heure est
    fruit gorgé dès qu’il fait nuit.
    Nuit —
    Mon ventre sur ton dos,
    galop rutilant qui claque,
    — dire que même dans
    mes rêves je t’écris !,
    telle la fleur ou le crapaud,
    rutilante
    je t’écris. Tu es mon tourment,
    ma neige. Ne t’en va pas, je
    m’avance vers toi.
    Dire que même au galop dans mes
    rêves, j’appelle, je t’écris !



    Dominique Maurizi, Septième rive, Éditions La Tête à l’envers, 58330 Crux-la-Ville, 2017, page 52.






    Dominique Maurizi, Septième rive








    DOMINIQUE MAURIZI


    Vignette Maurizi




    ■ Dominique Maurizi
    sur Terres de femmes

    Dans l’odeur des algues (extrait du recueil Langue du chien)
    Fly (lecture d’Isabelle Lévesque)
    La Lumière imaginée (lecture d’Isabelle Lévesque)
    [Intérieur] (extrait de La Lumière imaginée)
    Il y a quelqu’un (extrait du recueil Les Tables des matières)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de la revue Texture)
    une lecture de Septième rive, par Jacques Morin
    → (dans la Poéthèque du site du Printemps des poètes)
    une fiche bio-bibliographique sur Dominique Maurizi





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  • Claudia Azzola | Saltimbanques de rue



    STREET JESTERS
    SALTIMBANCHI





    Street jesters seem to have long long
    Arms that in an instant could touch
    The skies, their jests and puns being
    Eyed high above by magpies,
    The longtime plotted plunge into
    Deep celestial waters of folly and stars,
    Acme of their weariness,
    The comedians’ outlandishness,
    The life they lead, that dragonflies.





    SALTIMBANCHI DI STRADA




    Saltimbanchi di strada lunghe lunghe braccia
    pare abbiano, che in un istante potrebbero toccare
    i cieli, giochi di parole e capriole sono osservati
    dall’alto dalle gazze,
    il tuffo a lungo progettato dentro
    celestiali acque profonde di follia e di stelle,
    acme della loro stanchezza,
    lo spaesamento dei teatranti vaganti,
    la vita che conducono, quella delle lucciole.



    Claudia Azzola, Il mondo vivibile, Poesie, La Vita Felice Editore, Milano, 2016, pages 19 et 71.






    Claudia Azzola, Il mondo vivibile







    SALTIMBANQUES DE RUE



    Saltimbanques de rue
    ont, dirait-on, des bras longs, longs, longs,
    qui pourraient toucher les cieux
    en un instant, jeux de mots et cabrioles
    sont observés d’en haut par les agasses,
    leur plongeon tête en avant, de loin dans
    les profondes eaux célestes de folie et d’étoiles,
    apogée de leur épuisement,
    le déracinement des comédiens ambulants,
    la vie qu’ils mènent, celle des lucioles.



    Traduction inédite d’Angèle Paoli







    CLAUDIA AZZOLA


    Claudia Azzola
    Source




    ■ Claudia Azzola
    sur Terres de femmes

    Venezia (poème extrait du même recueil)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de La Vita Felice Editore)
    une fiche bio-bibliographique (en italien) sur Claudia Azzola
    → (sur Terre à ciel)
    d’autres poèmes extraits d’Il mondo vivibile traduits par AP





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  • TdF n° 147 ― février 2017  (Sommaire)



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    SOMMAIRE DU MOIS DE FÉVRIER 2017


    Terres de femmes ― N° du mois de janvier 2017
    Claudia Azzola | Saltimbanques de rue
    Dominique Maurizi | [Mais qu’ai-je dit ?]
    Brigitte Baumié, Paysages intermittents (extraits)
    Nathalie Michel, Veille (lecture d’Isabelle Lévesque)
    Serge Velay, Le Palais d’été (extrait)
    Thomas Vinau | Les gouttes
    Claude Ber, Il y a des choses que non (lecture d’Angèle Paoli)
    Bartolo Cattafi, Mars et ses ides (extraits)
    Ariel Spiegler | [Je vais ramasser dans mes paumes]
    Nicolas Grégoire | [tendre tendue]
    Arian Leka [L’amour en automne]
    Nathalie Michel [Alone Together]
    Sophie Loizeau | [Moabi quand tout va bien]
    Sofia Queiros | [je à la pointe du jour]
    Frédéric Tison, Le Dieu des portes (lecture d’Angèle Paoli)
    Henri Meschonnic | [chaque instant est un nouveau visage]
    Lou Raoul | [dans les maisons détruites abandonnées]
    Béatrice Bonhomme | Tes nuits sont devenues mes jours
    Maud Thiria, Brindilles (extraits)
    Ève de Laudec & Bruno Toffano | [Pleine | Gorgée d’esquives]
    France Burghelle Rey | Les Tesselles du jour (extraits)
    Brina Svit, Nouvelles définitions de l’amour (lecture d’Angèle Paoli)
    Paul Farellier | [Ce sera très loin sous la mer]
    Mélanie Leblanc, Des falaises (lecture d’Isabelle Lévesque)

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