Terres de Femmes

Mois : mars 2008


  • 3 mars 1982 | Mort de Georges Perec

    Éphéméride culturelle à rebours




         Le 3 mars 1982 meurt à Ivry-sur-Seine le poète Oulipien Georges Perec.







    Perec
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    PENSER/CLASSER


        « Publié en 1985, Penser/Classer constitue le premier des recueils édités après la disparition de Georges Perec, le 3 mars 1982.

        Classant le monde pour le comprendre, Georges Perec n’a cessé de bouleverser les conventions du sensible et des hiérarchies établies. Son regard confère aux êtres et aux choses de tous les jours une densité inattendue qui trouble et émerveille. »
    (Maurice Olender)







    La_citta_ideale
    Source







    De la difficulté qu’il y a à imaginer une Cité idéale


    Je n’aimerais pas vivre en Amérique mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre à la belle étoile mais parfois si

    J’aimerais bien vivre dans le cinquième mais parfois non

    Je n’aimerais pas vivre dans un donjon mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre d’expédients mais parfois si

    J’aime bien vivre en France mais parfois non

    J’aimerais bien vivre dans le Grand Nord mais pas trop longtemps

    Je n’aimerais pas vivre dans un hameau mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre à Issoudun mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre sur une jonque mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre dans un ksar mais parfois si

    J’aurais bien aimé aller dans la Lune mais c’est un peu tard

    Je n’aimerais pas vivre dans un monastère mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre au « Négresco » mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre en Orient mais parfois si

    J’aime bien vivre à Paris mais parfois non

    Je n’aimerais pas vivre au Québec mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre sur un récif mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre dans un sous-marin mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre dans une tour mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre avec Ursula Andress mais parfois si

    J’aimerais vivre vieux mais parfois non

    Je n’aimerais pas vivre dans un wigwam mais parfois si

    Je n’aimerais pas vivre à Xanadu mais même, pas pour toujours

    Je n’aimerais pas vivre dans l’Yonne mais parfois si

    Je n’aimerais pas que nous vivions tous à Zanzibar mais parfois si



    Georges Perec, PENSER/CLASSER, Éditions du Seuil, 2003, pp. 127-128-129.






    ■ George Perec
    sur Terres de femmes

    7 mars 1936 | Naissance de Georges Perec



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur YouTube)
    une interview de Georges Perec






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  • TdF n° 40 ― mars 2008



    Logo_mars_2008
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    SOMMAIRE DU MOIS DE MARS 2008



    Terres de femmes ― N° du mois de février 2008
    1er mars 1972 | Mort de Violet Tréfusis
    Fabienne Courtade | suffoquer prendre cette douleur
    3 mars 1982 | Mort de Georges Perec
    Première édition de LA TRANSCONTINENTALE à Marseille
    À l’aplomb du mur blanc (Angèle Paoli)
    Tristan Tzara | Quelle est la belle au cœur d’eau
    Angèle Paoli et Guidu Antonietti di Cinarca à l’Espace Art contemporain du Domaine Orenga de Gaffory à Patrimonio (Haute-Corse)
    Carlo Bordini, Polvere
    Sandra Moussempès | Vestiges de fillette
    Hélène Sanguinetti le 14 mars dans le Cap Corse
    Valérie Rouzeau | À me bercer
    16 mars 1908 | Naissance de René Daumal
    Stefanu Cesari | Ti scrivaraghju in faccia
    18 mars 1950 | Création de Symphonie pour un homme seul
    Vendredi saint à Sartène. Le Catenacciù
    Sophie Loizeau | Vendredi
    Raymond Carver | La Vitesse foudroyante du passé
    22 mars | Jean Giono, Le Grand Troupeau
    La Pensée de midi, « Tanger, ville frontière », par Angèle Paoli (Chroniques de femmes)
    Pierre d’angle, tableautins (Angèle Paoli)
    26 mars 1980 | Mort à Paris de Roland Barthes
    J’attends (Angèle Paoli)
    27 mars 1995 | Pierre Bergounioux, Carnet de notes 1991-2000
    27 mars 1899 | Naissance de Francis Ponge
    30 mars 1973 | Les Noces de Figaro par Giorgio Strehler
    30 mars 1844 | Naissance de Paul Verlaine
    e.e. Cummings | Beautiful
    Terres de femmes ― N° du mois d’avril 2008



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  • Fabienne Courtade | suffoquer prendre cette douleur

    «  Poésie d’un jour  »


    Nous_sommes_dos__dos
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    suffoquer prendre cette douleur




    suffoquer prendre cette douleur
    délicieuse    douceur attendre
    regarde passer

    je voulais t’avaler, je te regarde, je       
    n’en reviens pas j’y reviens pourtant je

    viens
    regarde

    avale
    perds
    un peu de sueur      bord
    des lèvres     si douces évidentes s’y
    noyer
    avec
    champ de bataille     même
    sous
    dessous moins que
    rien au-dessous de
    moins que rien
    fermer avec mots inscrits sur papier : mots d’amour ― écrit-il
    / sans /
    ce sont mots derniers, sur billet de banque combien
    je      coûte      (rien je
    ne
    coûte      rien

    le corps est de dos
    nous sommes dos à dos


    j’avance




    Fabienne Courtade, Table des bouchers, éditions Flammarion, Collection Poésie/Flammarion dirigée par Yves di Manno, 2008, pp. 151-152.






    Fabienne Courtade  Table des bouchers





    FABIENNE COURTADE






    ■ Fabienne Courtade
    sur Terres de femmes


    Table des bouchers, poésie (note de lecture d’AP)
    19 août 2004 | Fabienne Courtade, le cœur bat très vite (extrait de Table des bouchers)
    Rien ne nous précède (extrait de Ciel inversé)
    [le fleuve s’entend au loin] (extrait de Corps tranquille étendu)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    poème inédit [sans titre]





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  • 1er mars 1972/Mort de Violet Tréfusis

    Éphéméride culturelle à rebours




         Le 1er mars 1972 meurt à Florence (Villa dell’Ombrellino) la romancière anglaise Violet Tréfusis (née à Londres le 6 juin 1894).




    Portrait_de_violet_trefusis
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    BRODERIE ANGLAISE

        De mois en mois, Alexa gagnait du terrain ; John fut bientôt pris dans un réseau d’habitudes grâce auxquelles il crut retrouver un bonheur qu’il n’avait jamais connu. Sa passion ombrageuse pour Anne, ses rapports éphémères avec d’autres femmes, ne lui avaient laissé que des souvenirs noirs ou blancs. Or il découvrit que le bonheur est d’une teinte neutre…
        Les années se succédèrent. Au plat « confortable » de leur liaison, John ajoutait le souvenir d’Anne comme piment. Chose curieuse, ses conquêtes plus récentes avaient moins de saveur, parce que matérielles, parce que disponibles. Anne, déformée par son imagination, drapée dans sa légende, exerçait sur lui l’attrait d’un mirage.
        Alexa était moins jalouse du présent que du passé, mais à vrai dire, sa jalousie était comme un écureuil qui rebondissait de branche en branche. Elle visait tantôt le passé, tantôt le présent, comme tout à l’heure, tenez ! au sujet de la petite Manning… Seulement, voilà ! « Elles sont mal faites, mes scènes de jalousie, conclut-elle avec une moue de dépit. Des scènes dans le vague qui ne s’appuient sur aucune pièce à conviction. On les éviterait facilement avec un sourire, un haussement d’épaules. Il aurait fallu lui jeter négligemment une lettre comme cela se fait au théâtre, allumer une cigarette pendant qu’il la lisait…
        ― Je l’ai trouvée par terre quand on faisait la chambre.
        Et lui, blême, confondu :
        ― Et que comptez-vous faire à présent ?
        ― Vous quitter, cher ami, lui lancerait-elle à travers une volute de fumée, sans nullement se départir de sa sérénité. »
        Bien entendu, elle n’en ferait rien mais il s’agissait de le punir, de le plonger dans l’angoisse. Une bouffée de vent sonore, s’engouffrant dans la cheminée, le ramena au sens de la réalité. Au même instant, à l’étage supérieur, une porte claqua. Alexa tressaillit. Le vent de mars lui apparut sous l’aspect d’un ruffian, une perle à l’oreille, un poing sur la hanche. Un Franz Hals, trousseur de filles, avec des nuages affolés attachés au bout de sa longue pipe. Brutal, il giflait les maisons et rajeunissait le temps.
        Comment Alexa n’eût-elle pas pensé aux premiers mois de sa liaison avec John, qui ne pouvait entendre le vent sans pâlir ?
        ― Anne l’aimait tant, vois-tu, lui expliquait-il. Elle ne permettait qu’au vent de lui couper la parole. Parfois elle s’interrompait au milieu d’une phrase pour l’écouter. Quand le vent soufflait, il prenait part à nos conversations, seulement elle lui accordait plus d’attention qu’à moi. « Quand je serai morte, disait-elle, nous ne nous quitterons plus. Mes cendres seront éparpillées de par le monde. J’attends d’être morte pour voyager à peu de frais. » Et puis le vent l’embellit : elle a des cheveux aptes à la lutte et réfractaires au repos.
         Cette phrase était restée gravée dans la mémoire d’Alexa. Et elle, avait-elle des cheveux réfractaires au repos ?



    Broderie_anglaise



    Violet Tréfusis, Broderie anglaise, Plon, 1935 ; 10/18 domaine étranger, Union Générale d’Éditions, 1986, pp. 112-113-114.





    VIOLET TREFUSIS

    Violet

    – (sur le site des Après-midi de Saint-Loup) une
    notice biographique sur Violet Tréfusis.



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